Table des matières
Comparaison critique entre Freud et Adler : psychanalyse dépendante ou psychologie libératrice ?
Introduction
Sigmund Freud et Alfred Adler sont deux figures majeures de la psychologie moderne. Tous deux autrichiens, contemporains, ils ont pourtant suivi des chemins radicalement opposés après leur collaboration initiale au sein de la “Société viennoise de psychanalyse”. Tandis que Freud fonde un système fermé, centré sur le passé, l’inconscient et la sexualité refoulée, Adler prend une direction diamétralement opposée : responsabilisation, sens de la vie, futur, volonté, action. Cette opposition a des conséquences pratiques, éthiques et économiques très concrètes.
1. Vision de l'humain et origine des troubles psychiques
1.1 Freud : un homme dominé par l'inconscient
Le sujet est conditionné par ses pulsions refoulées, essentiellement sexuelles (libido). Les traumatismes de l'enfance sont la source des névroses (cf. “L’interprétation des rêves”, 1900). L’inconscient est un territoire obscur que seul l’analyste peut décoder. Citation : “L’homme n’est pas maître dans sa propre maison.” — Sigmund Freud
1.2 Adler : un homme qui choisit son chemin
L’humain cherche à compenser ses faiblesses par un objectif de supériorité. Il souffre de ses croyances erronées sur lui-même et le monde. La névrose est un choix de comportement face à une difficulté. Citation :
“Nous ne sommes pas déterminés par nos expériences mais par le sens que nous leur donnons.” — Alfred Adler
2. Rôle du thérapeute et du patient
2.1 Freud : un patient passif, un analyste tout-puissant
L’analyste est le détenteur du savoir, le patient doit parler, associer librement, être analysé. Le patient est vu comme malade, inconscient de ses conflits. La guérison passe par la “prise de conscience” des contenus refoulés, selon un processus long .
2.2 Adler : une relation d’égal à égal
Le thérapeute travaille avec le patient pour comprendre le but de ses comportements. Il s’agit d’encourager le sujet, de lui faire retrouver courage, responsabilité et solidarité. L’objectif est d’aider l’individu à s’intégrer socialement et à se libérer de ses auto-limitations.
3. Durée et orientation des thérapies
3.1 Freud : la thérapie sans fin
Durée moyenne : plusieurs années (5, 10, 20 ans ou plus). Le patient reste dans une démarche d’analyse permanente, sans critères clairs de “guérison”. L’analyste est indispensable au processus, ce qui crée une forme de dépendance institutionnalisée. Source : Michel Onfray, “Le crépuscule d’une idole : L’affabulation freudienne”, Grasset, 2010
3.2 Adler : vers l’autonomie rapide
La thérapie est courte, orientée vers le présent et l’avenir. L’objectif est que le patient retrouve son pouvoir d’agir. Des outils concrets (réécriture de croyances, mise en action, plan de vie) sont proposés. Source : Rudolf Dreikurs, “Psychologie de la vie quotidienne”, 1953
4. Conséquences économiques et sociales
4.1 Le système Freud : un modèle rentable
Une thérapie longue = des centaines d’heures facturées. Le modèle a été massivement implanté dans les universités, les hôpitaux, les institutions. Il crée une élite intellectuelle autour de l’interprétation, du pouvoir symbolique du psychanalyste. Exemple : En France, Jacques Lacan a renforcé ce système dans les années 1960-70 avec sa théorie opaque et inaccessible, favorisant la création de cercles fermés (“cartels”).
4.2 Adler : une menace pour le business de la psychanalyse
Si les patients se soignent vite, le système s’effondre. Adler est marginalisé, sa méthode peu diffusée dans les formations universitaires. Son message est trop libérateur pour un système qui préfère les patients “en analyse” à vie. Citation : “La psychanalyse est une industrie de la parole, mais Adler a préféré l’acte. Cela ne rapporte pas.” — extrait d’une conférence de Henri Ellenberger
5. Conclusion : entre servitude psychanalytique et libération psychologique
Freud a mis en place une mécanique qui s'apparente à une religion laïque, avec ses dogmes, ses interprètes autorisés, ses temples (les cabinets) et ses fidèles (les patients). Le patient ne guérit pas, il “progresse”… sans fin. Ce modèle est taillé sur mesure pour alimenter une industrie de la souffrance. Adler, lui, propose une approche fondée sur la responsabilité, l'action, l'éthique sociale et la solidarité. Il est dangereux pour le système car il guérit vite. Son modèle pourrait être un pilier d'une psychologie populaire, libre, et non marchande.
Sources et références
Freud, S. (1900). L'interprétation des rêves. Adler, A. (1927). Understanding Human Nature. Dreikurs, R. (1953). Psychologie de la vie quotidienne. Ellenberger, H. F. (1970). La découverte de l'inconscient. Onfray, M. (2010). Le crépuscule d'une idole. L'affabulation freudienne. Jacoby, R. (1983). The Repression of Psychoanalysis: Otto Rank and the Limits of Freudian Theory.